LA PART SECRÈTE

 

 

Déliant une bribe en-dessous d'un stylo
Je retrace un losange il ne te sert à rien
Je n'ai plus souvenir je n'ai plus moindre mot
À laisser s'affranchir de mes yeux vers les tiens

Et j'ai vécu cent ans sans m'en apercevoir
Sous un astre radieux qui ne dit pas son nom
J'ai vécu tant vécu d'un idiot désespoir
Sous un vieux souvenir qui me sert de prénom

Je n'ai plus souvenirs je n'ai plus tous mes dons
Et je n'ai que ceci cette ancienne écriture
Dans un coin de ma peau la marque d'abandon
Écrite en sanglotant entre chaque rature

La nuit meurt elle aussi dans un coin de la voûte
Noyée par un soleil par une surbrillance
Noyée là dans son ombre à la gorge du doute
Sans doute l'écriture elle-même brillance

Je n'ai pu dérober la porte du secret
Où se cache esseulée nos mémoires intimes
Où s'épanche abîmée une part du regret
Nos mots amoncelés que l'on nommait sublimes

À-côté triste coeur la part d'or de la nuit
Mélodie clandestine à son parapluie dort
Au creux de cette peau un trésor ébloui
Nous raconte sans lèvre une histoire insonore

Grain de beauté ô grain de sel échantillons
D'un ciel autrefois nuit, maintenant lumineux
Où se fixent silence un de ces beaux rayons
Qui va resplendissant distendre tes yeux bleus

Où s'allonge animale une autre trace écrite
Sur une peau rayée par mes ongles de jais
Dix diamants de vinyle y cherchent la musique
Cette muse hystérique aux doigts noircis de neige

Où va s'éparpiller symphonie silencieuse
Notre petite mort sur papier imprimé
Là où va se noyer dans la mer cotonneuse
L'heure lente du monde à peine déployée

Ô mes petites morts vous n'avez rien vécu
D'autre qu'un intervalle un instant pâmoison
Tout à-côté du monde au lointain jamais plus
À l'illusion des sens qui brille sans raison

Et sur ma partition la ligne de ta voix
Sur soleil imprimé où toute couleur danse
Sur la constellation magnétique on y voit
Briller notre incendie à même la nuit dense

 

 

 

23 Septembre 2006