Les divagations d'un mec bourré

 

 

Bon, maintenant il est où mon foutu bonheur... il est bien caché le salop, le lâche... j'ai beau remuer la maison sens dessus-dessous, jamais il ne montre un bout de son orteil, le maniaque. Le bonheur est un maniaque de la fuite, c'est sûr... C'est comme les divinités, on en entend parler, mais jamais elles se montrent... c'est pas comme les étoiles... c'est peut-être des divinités elles aussi, les étoiles là, dans l'univers. Mais non faut toujours qu'on invente l'impossible. Le jour où on croisera dieu dans la rue, on le prendra pour un grand singe. Vieille croûte. Allez, je bois encore un coup... fais chier là... c'est quoi cette vie encore.... y en a des milliards de résidus de primates comme moi je pourrais bien aller faire un tour du côté du dodo éternel, ça n'y changera pas grand-chose. Je crèverai moi aussi, puis le monde se tassera bien par-dessus moi, sans rien à redire. J'irai crever moi aussi mais je vais manquer à personne comme une veille merde. Ma vie ça aura été ça, un feu d'artifices mouillé... je vous le dit... tiens pour la peine je vais me remplir un nouveau verre moi, fais chier...chuis même pas un vrai alcoolo, je bois trois gouttes pour trouver la force de parler d'amour, voilà... je rêve, toujours, avec une poussière dans l'oeil je rêve et le rêve me le rend bien, il me prépare ma tombe bien douillette, entre les orties, sous le sapin. Voilà, ce sera le joli sapin de noël, avec un beau cadeau sous lui, un joli cadavre, c'est moi coucou, ça va les amis... Je reviens d'entre les morts pour vous dire que j'ai un chagrin d'amour... la belle affaire, rien à foutre. Y a autant de chagrins d'amour qu'il y a d'hommes sur la terre, sinon plus. C'est sûr... je vous le dit... on va tous crever... on rêve d'amour pour donner un sens à la vie.... la belle illusion... le beau mirage. Va se passer quoi quand je vais crever moi, j'aurais rien compris à la vie, voilà ce que j'ai vais lui dire à l'ange. J'ai rien compris à cette vie, je sais même pas si j'ai vécu. La vie c'était ça, c'était comme un film que j'ai regardé, j'en ai pas compris la moitié de l'histoire. Y a des personnages flous, ils ont jacassé toute une vie mais pas une fois, ils ont parlé, en vrai je veux dire... Y a des embrassades foireuses et baveuses, hmmm la bonne bave... je lui dirai ça, à l'ange, j'ai rien compris à ton histoire, c'est passé trop vite, j'ai pas du bien comprendre la fin je peux la revoir... 24 images par seconde c'est pas vivable, j'ai pas le temps, c'est trop pour moi... c'était quoi cette histoire...Pas le temps de commencer à comprendre que je suis déjà crevé comme une vieille chiasse... Mais bon j'avais un côté romantique quand même, hein ? oh c'était pour plaire aux filles.... leur plaire, je sais y faire... mais pour ce qui est de les baiser... Je vous le dit mon ange, c'est comme un rideau devant ma vie... y a tout ce que je présente, y a tous le beau crépis... et puis y a le reste derrière, ma vie telle qu'elle, ma vie nue... Vous savez ce que c'est mon ange, ma vie nue... c'est ça.... un petit cri poussé du fond de l'armoire, sans plus... de la nuit... une goutte de sperme pour me faire naître.... Des litres de sang en moi... tout ça pourquoi je me demande, j'ai un coeur... je hais ce monde.... je hais la vie... je chie sur l'être humain, il me fait chier... je rêve d'une putain d'autre chose dont on a pas idée. J'ai peur de la mort en plus, elle fait chier celle-là aussi, pour qui elle se prend, la mort... Venir nous enlever comme ça, les amoureux, les heureux en premier... J'y comprends rien, c'est pourquoi qu'on vient au monde ? C'est quoi cet instinct qui pousse les femmes à faire germer ces bouts de gigots entre les excréments et les urines. Pourquoi on vient au monde, nom de dieu j'en ai marre... C'est quoi ce cirque. Il est où le spectacle. Pourquoi on en sort tous avec une gueule blafarde du grand opéra de la vie. Pourquoi les gens me donnent l'effet de faire semblant d'exister. C'est quoi cette Terre cette boule ronde perdue dans cet infini noir, merde. J'y comprends rien... Qu'est ce que c'est que ces galaxies en forme de spirales, ces étoiles qui brillent là-haut, ça vient d'où. Voilà, ce que je lui dirai, à mon ange qui viendra récupérer ce qu'il reste de mon âme une fois que je serai éteint avec personne à qui manquer... Ah mais quand même, on y trouvera quelques-uns le jour de mon enterrement, ils seront tristes c'est sûr, le temps des sacrements peut-être. Mais oh ça passera bien vite, et d'ici quelques années je serai un reste de bout de tombe perdue au fond d'une cimetière. ouais je l'imagine bien, d'ici quelques années on trouvera ça de moi, quelques molécules de mes os profondément dans la terre... et puis on trouvera ça aussi, la merde que je suis en train d'écrire... avec les fautes d'orthographe. Oh et puis merde il est où le paradis.
On y rêve on s'y tue à la tâche mais pas moyen de mettre la main dessus, sur le fameux paradis. C'est encore une escroquerie ça. C'est la carotte et le bâton, je vous le dit... C'est ce qui nous pousse en avant dans la vie... une espèce de paradis nébuleux qui est sensé être là, devant nous, à nous tendre les bras...Alors on fonce nous autre débiles. On baise pas mal. Le paradis c'est avant ou après la mort, j'en sais rien... d'après ce qu'on m'a dit c'est après le feu rouge, comme toujours, le seul endroit qu'on ne connaît pas, c'est là qu'il est le bonheur, là on n'y connaît rien. Dans l'inconnu, en somme. L'idée de bonheur se marie bien avec l'idée de l'inconnu. Et pour cause... c'est la même chose. Oh et puis merde je m'en vais en remettre une couche, je vais me servir un nouveau verre, tant pis pour vous.
 
 
Voilà le paradis il est là, je vais te l'expliquer, pendant que je tiens debout... C'est la potion magique, il là tout au fond de ton rire, le bonheur... Je l'ai vu il bougeait... C'est un ami à moi je le connais, un frère, ton rire il me fait gigoter... parce que je me dis c'est moi, la cause de ton bonheur, c'est moi ta joie de vivre au fond de la nuit. C'est l'élixir qui se remplit chaque heure, il est pas loin, il rôde, prêt à bondir par dessus les toits, pendant que tu es toi pendant que tu existes par-dessus moi et le reste du monde... Il est jusqu'au fond de ton sourire qui va résonner dans la nuit, je l'emporterais bien avec moi pour toujours, ton rire et le cacher loin des yeux de la tristesse qui me ronge... il était là en pulsation... comme un quasar... il tournoyait dans l'univers. C'est tout ce qui t'attend dans la vie, rien d'autre, ce beau feu de joie... Tu es venu là une sur des milliards... mais il y a que toi de vivante, petit grain de sable dérisoire... regarde la terre tourne... C'est une belle toupie, un jeu d'enfants l'univers... dieu est un sale gosse, il joue, il s'éclate, il féconde des merveilles par milliards...C'est ça la vie.... un grand plateau de jeu avec des planètes et des étoiles qui tournent dans tous les sens... On aurait tôt fait de nous y perdre... Parce que tu es une merveille ça c'est sûr... je dis pas ça par hasard... je sais ce que je dis... tes petites espérances, tes chagrins, tes sensations d'être... tout ça. Oh tu pourras bien dire que je suis fou... nous le sommes tous... je mets un peu de désordre... pour ton bien... en voilà une belle de nouvelle dimension non. Le paradis c'est ce que tu auras si tu te donnes la peine... si tu dépasses un peu, si tu vas franchir quelques frontières... Le paradis te précède, tu marches dans ses pas dans son ombre, je l'ai vu plusieurs fois ce fichu bonheur... tiens je vais te donner la combine, note bien... Je vais t'expliquer exactement où il se trouve le paradis, écoute moi bien... t'auras peut-être pas deux fois cette chance dans toute ta vie... Le paradis il est dans ta liste des courses, voilà... tout en bas, entre le lait et le jambon...c'est dit... mais c'est pas tout... il est aussi quand tu te dépêches de traverser la route pour ne pas te faire écraser, il est là quand tu presses le bouton pour allumer l'ordinateur... il est là quand tu es triste... quand tes yeux sont tout humides... il est dans le cendrier là où tu as jeté les ongles que tu viens de ronger... Il est dans l'évier quand tu recraches le dentifrice... il est dans la boîtes de serviettes hygiéniques, en haut de l'armoire à pharmacie... voilà, il est là mais c'est pas tout... j'ai pas fini... je veux pas être trop obscène, mais le bonheur il est là aussi... là où je pense... et quand tu regardes à moitié la télévision il est là aussi, frétillant...quand tu cherches les clefs pour ouvrir la porte, quand tu envoies tout chier une bonne fois pour toutes, quand tu m'envoies chier avec le reste... Voilà... il est là, quand tout à coup une voix t'appelle te dit allons nous-en vers la putain de féerie à tout jamais, et que ça ne se fait pas, parce que c'est pas poli pour les autres et pour l'avenir, être trop heureux c'est insolent il est là, le paradis, dans tout ça... exactement...

 

 

31/08/06