[VOICI LA MORT]
voici la mort, mon amour, la corde à mon cou
est encore plus douce que la soie trouvée dans vos cheveux, tirez
toute l’expérience de la brûlure et de la plaie qui
s’écarte pour qu’arrive enfin le jour entre les pages
de notre livre, souriez, je ne vous vois plus, vendez toutes les peintures
des plafonds obsessionnels à écrire, je ne sais plus la
hauteur de l’eau ni le nombre de grains de beauté qui sont
éparpillés sur votre peau allongée sous les pommiers
quand la mer était moins forte, rappelez-vous la couleur de la
mer et du sable entre nos cuisses, voici la mort, mon amour, invendue
collante et serrée, le ventre lisse avec le gant indien, et la
fraîcheur du soir qui tombe sur notre dos en nage, et quelques
centimètres encore à gravir avant d’y arriver, vous
ne sentirez rien, ni la douleur glacée ni la putain qui sèche
ni le marbre froid qui chante dans nos cercle à côté
de nous, 9 mètres encore à descendre, un mètre
encore à tenir, mon amour, vous ne sentirez rien, condenser,
ni la fleur dans l’assiette qui éclabousse tous nos jardins,
nacrés au ciel entre les bassins, nos corps bouffés par
nos insectes, nos corps sans figure quand il fallait nous sucer, toutes
ces pilules qu’on ne prend plus pour ne plus rien sentir, la vitesse
le sucre et même pas la pluie à notre signal pour nous
salir les poings, notre lait à venir, venu jusqu’ici n’aura
plus le même goût que les autres fois, moins sucré
dans la bouche et beaucoup plus dur sous les ongles maintenant que vous
me touchez le visage, les ongles ondulés, mon père, votre
verre à mes lèvres, le poison jusqu’ici, l’hématome
entrain de nous confondre et le livre ouvert pour ne plus avoir faim,
j’aimerai vous entendre une dernière fois bouger dans mes
propres cendres, mais voici la mort, mon amour, aussi grande, celle
que vous m’avez promis un jour quand le ciel déclinait
sur nos mains, il faisait froid le chemin était blanc entre les
tombes comme le papier déchiré que l’assassin agrafe
avec ses derniers mots pendant que vous dormiez, l’escalier qui
montait trop haut, la peur au ventre, l’étang qui se rétrécissait
jusqu’à cet endroit sombre où vous m’avez
tué, voici la mort, mon amour, et le canon scié mat de
peau très près de la temple avant de me donner l’ordre
de tirer, à vous tous mes soldats, à vous toutes mes putains,
souriez, venez tout prendre, venez avec moi, traversons la grande place
avec mes yeux où les mouches se caressent avec notre sang, le
sable est un endroit clos qui gèle quand l’eau est en feu,
suicidez-vous, ma couleur est blonde, j’avais 11 ans à
genou quand les avions traçaient dans le ciel, je vous les donne
maintenant toutes les fleurs arrachées au dessus des socles en
béton, celle que vous enfonciez si bien avec vos ongles parce
que la pluie pouvait enfin défoncer la terre après l’orage,
je n’ai que l’herbe à reprendre et la mèche
de cheveux à faire fondre pour me rappeler de vous, demain j’irai
tué l’ombre et les endroits où je me cachais nu,
votre robe, mais voici la mort, mon amour, telle que vous me l’avez
écrit un jour sur la hanche, à côté des framboises
en ordre dispersé sur un piano en attendant de vous entendre
jouer pour la dernière fois, seuls