"Regarde-moi"
(Florian)
Il flotte du soir jusque très tard le matin dans un air qui est
à la fois la féerie et l'enfer, la maladie et la pureté. Le sol se dégrade sous ses pieds, il guette
le signe furtif d'une ivresse à venir, il arrête son regard
sur la moindre étincelle. Depuis le lointain de son absence au monde il guette les traces d'un ancien festin, sitôt qu'il en découvre une il cherche à la saisir, de toutes ses forces, puis il la broie. De fragiles petits morceaux de bonheur en fuite, comme un inaccessible essaim qui passe au-dessus. "Zak-zaka-zak" est le son de ses pieds lorsqu'il saute pour attraper les guêpes. Quand par hasard il en saisi une en plein vol, il pense déjà à lui arracher les ailes mais il doit sur-le-champ la laisser s'envoler, la piqûre lui a ouvert les mains. Il a déjà vécu son agonie et son paradis, ce dont
les autres ne se rendent compte qu'à la fin des choses, il aperçoit
le paysage et ce qu'il adore s'effacer, passer en dehors du champ, petit
prince sur sa micro-planète, ou du fond de son désert, il
règne comme un sphinx sur les dunes. Si cette vie ne lui a pas
réservé de chambre, s'il est poussé en dehors, on
peut toujours entendre son filet de voix, qui reste toujours la même,
malgré ce timbre sombre posé par la solitude, par ses absences,
comme une voilure ou comme un linceul, sa voix presque étouffée
lui permet encore de me dire : |
19/01/04
Peinture : Jon Kovach