Le Cocon (Novalis)
Il est un écran édulcoré, plastifié d'une
membrane jaunie, qui pleure d'une solitude nouvelle, très mal, tenu
par des fibres comme un cloporte indicible, et qui gémit, et qui
croit dans ses ascensions quelque chose de fouillé mais qui pleure
les fondations en ruines. Chacune de ses marches, chacun de ses symboles,
chaque signe est une veilleuse éteinte. Il est un cocon au visage
lacéré par ses fils de soie. Il est l'existence. Il est le
papillon de nuit en Suède où le soleil ne se couche jamais.
Sa peau est creuse comme s'il s'était appuyé des heures sur
un tapis de pointes. Ces empreintes sont les restes de son passé
meurtris. Son amour est en exil. Ici, il rampe comme un lézard au
soleil. Il n'est pas capable sans l'astre de maintenir la température
de son corps. Son trésor est caché dans une boite en ébène,
dans un flacon qui réunit à lui seul tous les parfums africains
et orientaux. Acre, vaporeux, condensé, fétide, léger...
Ses fétiches sont en attente dans son jardin d'éden, sa musique
à venir. Sa peau change selon la mesure de son mal-être. C'est
lui qui annonce: "Il faut partir à l'instant même". Il est la liqueur acide, la cloison fissurée. Il est aussi l'embarcation échouée sur la côte, le désir qui ne vient jamais le prendre dans sa réalité. Il est la mémoire de nous, pauvres enfants amoureux sans leurs trésors. Il est le fluide sous ton épiderme qui ne pense qu'à aimer. Il est la mèche blonde de la fille absente. Quand il a peur il se recouvre d'un voile sonore. Sa musique. Son portail vers ailleurs. Sa mémoire a plus de souvenirs que s'il avait mis au monde des dizaines de nouveaux-nés. Il est le glaçon dans le whisky, le ciel. (C'est une affaire de croyances au monde et d'ivresses). Cette idole abandonnée seule sur son nuage a la force d'amortir nos chutes meurtrières. Son poignet a la force aussi de soulever la meute. Il jette un regard vers l'horizon et tout le monde cherche ce qu'il admire avec tant d'affection. Le bombyx saillant et lumineux est un pistil sur la feuille de l'arbre tachetée. |
Les hippocampes (Ou le lait du Lotus)